« L’excès de pouvoir » du juge constitutionnel : entre dérapage et colmatage
1 Candidat au doctorat, Faculté de droit - Université de Montréal.
Résumé
Le droit comme la nature a horreur du vide. La faillibilité de l’oeuvre constituante justifie souvent l’exorbitante du juge constitutionnel. Telle est l’hypothèse que nous formulerons dans cet article pour répondre à la question de l’excès de pouvoir du juge constitutionnel. Nous verrons que la constitution étant « une toile inachevée », sa complétude s’effectue souvent au prix d’une usurpation de la fonction constituante par le juge constitutionnel. En outre, on ne saurait nier que la continuité de l’oeuvre constituante s’impose souvent comme une nécessité pour parer au déni de justice constitutionnelle, voire à l’inadéquation de certaines dispositions constitutionnelles au moment critique que vivent souvent les institutions de l’État. Ainsi, un « délit » d’usurpation de la part du juge constitutionnel est souvent commis pour éviter un déni de justice constitutionnelle et un dysfonctionnement institutionnel. Le sursis à statuer du juge constitutionnel peut paralyser le fonctionnement des institutions. On aurait pu imaginer un tel scénario au Gabon en 2018 n’eut été la contestable intervention du conseil constitutionnel dans le champ « compétentiel » du pouvoir constituant afin d’assurer la continuité de l’exercice de la fonction présidentielle. Tout ceci, au détriment de la spécialisation fonctionnelle des pouvoirs constituants et constitués. Ce faisant, le moment jurisprudentiel fusionne avec le moment constituant. Dès lors, en se déplaçant hors de son orbite, le juge constitutionnel transforme le moment jurisprudentiel en un moment constituant. Cette exorbitance conduit parfois à un excès de pouvoir du juge constitutionnel.