Justice et accélération sociale : quels changements pour les praticien.ne.s du droit ?
1 Candidat au doctorat, Faculté des arts et des sciences - Université de Montréal.
Résumé
La santé psychologique des avocat·e·s en pratique privée est précaire : c’est du moins ce qu’en concluent de récentes études. Le présent article propose d’établir un lien entre cette vulnérabilité et le rapport au temps de cette catégorie de juristes, soumis, comme c’est le cas pour la population en général, à l’accélération sociale. Deux aspects seront étudiés : l’augmentation du rythme et l’accroissement de la densité temporelle. Afin de mieux comprendre le rapport au temps que ce phénomène induit, on distinguera le temps de l’horloge, désigné aussi comme temps abstrait, du temps concret de la tâche qui, dans le cas des praticien·ne·s du droit, est un exercice de réflexion et d’idéation de solutions aux problèmes juridiques de leurs clientèles. Nous en conclurons que les temps concrets, grandement influencés par l’éthos professionnel, obéissent à des impératifs de l’ordre de l’émotion, par exemple, la satisfaction, la reconnaissance ou la sécurité. La volonté de se conformer à ces impératifs dans un contexte d’urgence ou de réduction des délais amène, dans certains cas, les avocat·e·s à inscrire leur travail dans un « temps clandestin », c’est-à-dire dans des temporalités autres que les heures de travail régulières ou le temps consacré à la famille.