L’arrêt Health Services and Support de la Cour suprême du Canada : La constitutionnalisation du régime québécois des relations industrielles ?
Résumé
L’arrêt de 2007 Health Services and Support, de la Cour suprême du Canada reconnaît le droit de négociation collective en tant que composante essentielle du droit constitutionnel à la liberté d’association tel que garanti par l’article 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés. Il s’agit là d’un renversement complet de la jurisprudence antérieure de la Cour, laquelle n’accordait, en 1987, qu’une portée très limitée à la liberté d’association, dénuée de tout impact quant à la sphère du travail : les travailleurs et leurs organisations ne bénéficiaient d’aucune garantie spécifique au titre de la liberté constitutionnelle d’association, pas davantage par exemple qu’un club de lecture! Cette étude entend analyser, de manière approfondie, la mise à l’écart par la Cour suprême de sa lecture antérieure, très formaliste, de l’article 2 d) de la Charte canadienne, et mettre en lumière le recours, nouveau en ce domaine, à une approche à la fois instrumentale et axiologique de la liberté d’association. Les critiques formulées à l’encontre du jugement de la Cour suprême, en particulier au sein de la communauté des travaillistes au Canada anglais, sont également discutées. Enfin, notamment sur la base du droit international (les conventions de l’OIT en matière de liberté syndicale), les auteurs étudient les implications prévisibles de l’arrêt Health Services and Support au Québec dans la perspective de la Charte des droits et libertés de la personne (article 3), y compris au regard du droit de grève.
English
The 2007 Health Services and Support ruling of the Supreme Court of Canada recognizes the right to collective bargaining as an essential component of the constitutional freedom of association guaranteed by s. 2d) of the Canadian Charter of Rights and Freedoms. This is a complete departure from the previous case-law of the Court denying, as early as 1987, that freedom of association grants any specific right to workers and their organizations: it meant no more than, say, the right to associate in a book club! This paper intends to provide an in-depth analysis of the Supreme Court’s reasoning when putting aside its previous formalistic approach of s. 2d) of the Canadian Charter, as well as considering its new adherence to both instrumental and value Jurisprudence in this field. The critics voiced against the Court’s ruling, especially in the English-speaking labour law community, are also discussed in this paper. Finally, particularly on the basis of international law (ILO conventions pertaining to freedom of association), the authors consider extensively the broad implications of the Health Services and Support ruling in Quebec, as regards s. 3 of theCharter of Human Rights and Freedoms, including the right to strike.